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La nouvelle Afrique centrale selon NGOMO Privat.
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18 février 2014

Déclaration solennelle de condamnation du Collectif Ad'hoc des Ekang du Gabon

 

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Par Privat NGOMO

Libreville, le 15 février 2014

 

 

Mais, quels crimes avons-nous commis ?

De quoi nous accuse t-on ?

De quels actes odieux, abominables, répréhensibles et antirépublicains la communauté Ekang du Gabon s’est-elle rendue coupable ?

 

Car désormais, elle est frappée d’une terrible fatwa par la seule volonté d’un homme, Michel Ogandaga, le conseiller en communication du président de la République. Ses propos haineux, que l’on peut qualifier d’incitation à la haine raciale, sont un véritable appel au meurtre d’une communauté bien identifiée, un simple appel au génocide, en somme.

 

Mais qui sont donc les Ekang ? Pour l’instruction des plus jeunes, ce sont les peuples issus d’un ancêtre commun appelé Nang ou Nanga, surnommé Ekang ayant vécu au 15ème siècle, et donné comme descendance, les peuples que l’ethnologie occidentale des siècles derniers a qualifiés, à tort, de Fang ou de Nfàn-Bəti-Bùlù ou de Pahouin. Cette inexactitude exogène est consacrée aujourd’hui comme vérité scientifique. Et lorsque Michel Ogandaga parle de Fang, il entend en fait Ekang.

 

« Tuez les tous ! », c’est par ce funeste titre, cette phrase assassine qui condamne à mort, qui demande l’extermination de la communauté Ekang du Gabon, que l’hebdomadaire d’informations générales « L’Aube » a relayé publiquement, dans sa parution n°11 du 27 janvier 2014, les propos de ce conseiller du président de la République, contenus dans un de ses posts, sur son profil Facebook. Post qu’il a depuis supprimé de son mur car les réactions multiples et indignées des internautes l’ont ramené à plus de sagesse.

 

Mais, le mal est fait ! Car Michel Ogandaga s’est posé en commanditaire de l’épuration de la communauté Ekang. Mais, sait-il seulement que le peuple Ekang est disséminé dans d’autres pays de l’Afrique centrale, comme la Guinée Equatoriale où il est numériquement dominant, et au Cameroun qui compte la plus grande communauté Ekang d’Afrique centrale ? Ignore t-il que les Ekang sont aussi au Congo, au Centrafrique et même à Sao-Tomé et Principe ?

 

Ce commanditaire de la mort pense t-il qu’aucune solidarité parentale ou communautaire ne sera de mise quand ils mettront leur forfait innommable à exécution ? Et croit-il vraiment, un seul instant, que les Ekang du Gabon se laisseront faire comme des agneaux que l’on conduit à l’abattoir ?


Mais, au fait, que nous reproche t-on en vérité ? Nous leur posons aujourd’hui la question de la manière la plus solennelle. Et nous attendons sereinement leur réponse. Mais déjà, nous nous interrogeons.

 

Etait-ce mal que de 1946 à 1958, Jean-Hilaire Aubame Eyeghe, premier maire indigène, disait-on alors, de Brazzaville, capitale de l’Afrique Equatoriale Française (AEF) fût le premier gabonais à représenter le territoire du Gabon à l’assemblée nationale française, au Palais Bourbon ?

 

Etait-ce mal que, Gabriel Léon Mba Minko mi Edang, fût le premier ministre du Conseil du gouvernement en 1957, après avoir été le premier maire de Libreville en 1956, et qu’il proclama l’indépendance de notre pays, le 17 août 1960, avant d’en devenir le premier président ?

 

Etait-ce mal que de 1960 à 1967, la vie politique du jeune Etat Gabon fût animée essentiellement par l’affrontement démocratique entre des personnalités hors-pairs comme Léon Mba, le présidentialiste et Jean-Hilaire Aubame, le parlementariste ?

 

Etait-ce mal que, sentant sa mort prochaine, Léon Mba choisît librement de remettre le pouvoir en 1967, non à un Ekang comme lui, mais bien au jeune Albert-Bernard Bongo, issu d’un peuple pourtant minoritaire?

 

Etait-ce mal que Germain Mba Nguema perdît la vie, en 1971, pour avoir eu une grande ambition pour son pays ?

 

Etait-ce mal que Jean-Hilaire Aubame Eyeghe, Jean-Marc Ekoh-Ngyema, Simon Oyono Aba’a croupîssent en prison, des années durant, pour n’avoir jamais accepté l’instauration du monopartisme en 1967 ?

 

Etait-ce mal que le même Simon Oyono Aba’a, dans la clandestinité et au péril de sa propre vie, se battît jusqu’à en payer le prix fort, pour qu’en 1981, les évènements dits « de la gare routière » fussent la figure annonciatrice de la conférence nationale, qui survint 9 ans plus tard, en 1990.

 

Etait-ce mal que Casimir Oye Mba, alors premier gouverneur de la Banque des Etats de l’Afrique Centrale (BEAC), fût appelé en 1990, dans ce moment grave de notre histoire, pour conduire une transition de tous les dangers ?

 

Etait-ce mal que Paul Mba Abessole incarnât l’alternance politique dans les premières années de la décennie 1990, et particulièrement au cours de l’élection présidentielle de 1993 qu’il remporta, du reste ?

 

Etait-ce mal qu’en 2009, André Mba Obame fut candidat, et probable vainqueur légitime de l’élection présidentielle selon le peuple souverain gabonais, et accrédité en cela par certaines sources françaises autorisées ?

 

Enfin, est-ce mal que le peuple Ekang s’efforcât, à côtés d’autres peuples frères du Gabon, de déployer tout son génie, toute son énergie pour le bonheur et la grandeur de notre patrie commune depuis l’avènement de l’indépendance du Gabon ?

 

Est-ce mal, monsieur Michel Ogandaga ? Nous vous le demandons !

 

Néanmoins, bien qu’à chacune de ces dates qui font l’histoire de notre pays, et au cours desquelles des membres de la communauté Ekang se sont illustrés, et souvent au mépris de leur propre vie pour l’intérêt général et le bien-être de toutes les populations gabonaises, nos pères hier, et nous-mêmes encore aujourd’hui, subissons des frustrations quotidiennes, cette discrimination secrète qui ne dit pas son nom, cet injuste et ingrat ostracisme qui sont le sceau de la géopolitique.

 

Pour rappel, sachez donc que :

 

Il eut d’abord les bourses que l’on ne voulait pas octroyer à certains étudiants Ekang malgré la qualité de leurs dossiers scolaires ; jadis, nous nous sommes tus. Nous n’avons rien dit !

 

Puis ce fut le tour des quotas pratiqués mais jamais officiels pour accéder, via des concours d’Etat souvent truqués, aux différents corps de métiers de notre pays, qui servirent de tamis pour les Ekang, car l’on estimait qu’ils étaient trop nombreux dans certains secteurs disciplinaires et qu’il fallait faire de la place aux autres ; jadis, nous nous sommes tus. Nous n’avons rien dit !

 

Ensuite ce fut l’accès aux postes de nomination dans la haute hiérarchie de l’administration gabonaise, dans les régies financières, dans les établissements parapublics et même à certains postes ministériels au sein du gouvernement, qui nous était soigneusement et officieusement refusé malgré nos curricula vitae, pourtant souvent de bonne facture ; jadis, nous nous sommes tus. Nous n’avons rien dit !

 

Ce fut, enfin, le slogan TSF (Tout Sauf les Fang) qui fut, insidieusement secrété en 2009, lors de la dernière élection présidentielle et qui soutendait l’idée selon laquelle, une communauté, quoique relativement majoritaire et dispersée sur les cinq provinces du Gabon, qui en compte neuf au total, ne devait  pas accéder de manière démocratique à la magistrature suprême aux motifs qu’elle écraserait les autres communautés et mettrait le pays à feu et à sang ; alors, nous avons voulu parler, mais on nous a conseillé de ne rien dire. Nous nous sommes tus !

 

A présent, par l’entremise spécieuse de Michel Ogandaga, conseiller en communication du président de la République, c’est un appel au meurtre d’une communauté qui est lancé, un simple appel au génocide du peuple Ekang ; Et nous devrions encore nous taire ?

 

Non, aujourd’hui, nous ne pouvons plus taire ces souffrances, ces ignominies, ces injustices faites gratuitement à un peuple qui, on l’a vu, participe activement, quelles que soient les périodes de l’histoire de notre pays, au renforcement de la démocratie, à l’Etat de droit et à la volonté commune de bâtir une nation dans la paix et la prospérité, pour tous.

 

C’est pourquoi, devant le mutisme cynique, incompréhensible et le silence inquiétant, complice voire coupable des plus hautes autorités gabonaises depuis la publication de l’hebdomadaire « L’Aube » qui se faisait ainsi l’écho public, d’une pensée exprimée par Michel Ogandaga, nous, le Collectif Ad’hoc des Ekang du Gabon, créé pour cette malheureuse circonstance, dénonçons publiquement l’inertie des pouvoirs publics et condamnons avec la plus grande fermeté les propos d’incitation à la haine raciale et au crime génocidaire du conseiller du président de la république, qui pour le coup, ne dois plus assumer la fonction qui est la sienne. De même, le Collectif exige un débat public sur la géopolitique et sa pratique dans notre pays depuis l’indépendance. Ceci, afin de permettre que la raison l’emporte sur les passions déchaînées qui peuvent malheureusement conduire à l’irréparable.

 

Et nous demandons enfin, que la présente assemblée générale s’accorde, avant l’issue de cette rencontre, sur le contenu d’une motion républicaine qui sera lue à l’endroit des pouvoirs publics, de la communauté nationale et internationale, et des médias nationaux et étrangers.

 

Je vous remercie. /-

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