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La nouvelle Afrique centrale selon NGOMO Privat.
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23 novembre 2018

CHRONIQUE D’UNE VACANCE DE POUVOIR IMMINENTE

Acte III et fin : comment investir Jean Ping à la présidence de la République ?

PREAMBULE. Près de 10.000 internautes-lecteurs ont lu avec beaucoup d’intérêt les actes I et II de cette chronique initiée le 12 novembre 2018 sur les réseaux sociaux, particulièrement sur les fora de FaceBook. En entamant cette chronique, nous étions loin de nous imaginer le grand intérêt qu’elle susciterait  auprès  des Gabonais et tous ceux qui suivent l’actualité de la vie politique du Gabon. A l’évidence, cette chronique satisfait un besoin important d’accéder, non seulement à la bonne et juste information, mais également à sa mise en cohérence grâce à une analyse qui se veut froide, rigoureuse et rationnelle. Nous ne prétendons pas, dans nos propos, délivrer LA vérité. Toutefois, la mise en corrélation des faits distincts et épars que nous établissons permet à l’observateur avisé ou non de se faire une idée assez proche de la vérité et partant, de mieux comprendre la situation nationale qui est, par nos soins, analysée.

3M&LeDrianChronique d’une vacance de pouvoir imminente, en trois actes, s’est donnée pour objectifs de cerner les contours obscurs de l’actualité nationale, d’en expliciter les enjeux et de les présenter de la manière la plus simple à tout internaute-lecteur intéressé. 

Le premier acte de cette chronique démontrait que le plan B, mis en œuvre par Jean Ping, a été savamment battu en brèche et défait par la France officielle et des réseaux qui ne souhaite pas voir le fils d’Omboué accéder à la magistrature suprême. Le deuxième acte mettait en évidence la complicité manifeste qui existe entre la France officielle et des réseaux et le clan Bongo-PDG quant à leur objectif commun de voir se perpétuer un système corrompu et incompétent alors qu’il est rejeté par la grande majorité des Gabonais qui a choisi l’alternance et le changement en août 2016. Cet acte précisait également le possible scénario politique retenu par le sinistre couple intrigant pour arriver à ses fins. Le présent et dernier acte se propose de suggérer des alternatives d’actions que Jean Ping et sa Coalition pour la Nouvelle République (CNR) pourraient mettre en œuvre afin de contrer les plans de l’adversaire. Mais pour bien bâtir les stratégies de la CNR, il est capital de saisir les forces et faiblesses du camp adverse.

FORCES ET FAIBLESSES DE LA FRANCE OFFICIELLE ET DES RESEAUX. Autres temps, autres mœurs. La France de février 1964, des années 1990 jusqu’à 2018 est restée la même dans son ambition de contrôler toute la politique et l’économie de son pré-carré gabonais. Mais en a-t-elle encore les moyens aujourd’hui ? Rien n’est moins sûr.

  • Usage classique de la force militaire et des assassinats. Pour assurer son influence totale dans sa « colonie » gabonaise, la France officielle et des réseaux n’a jamais reculer devant l’usage de (1) coup d’Etat, (2) d’actions militaires fortes et même (3) d’assassinats politiques pour réduire au silence toute tentative « patriotique » jugée par elle subversive. L’efficacité de ces actions résidait dans la maîtrise totale et confidentielle de l’information tout au long de l’exécution de ces processus « brutaux ». A l’heure des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC), le secret d’une action perpétrée hors des normes nationales et internationales n’est plus garanti de bout en bout.  (1) Un coup d’Etat des Français au Gabon, via le 6iéme BIMA, comme dans les années 1960, est inacceptable pour l’Union Africaine et la Communauté Internationale. Un coup d’Etat de palais par des sbires gabonais de la garde républicaine est tout aussi improbable car le monde y verrait naturellement la main de l’Hexagone. Ceci serait alors une minable publicité dont la France d’Emmanuel Macron n’a nul besoin en ce moment. (2) Si l’usage du coup d’Etat est à proscrire, la France peut-elle néanmoins recourir à des actions de soutien militaire ou de renseignement auprès des forces armées gabonaises qui seraient amenées à mater une révolte sociale gabonaise ? Nous répondons par l’affirmative car des contingents de militaires français sont arrivés récemment au Gabon pour prendre position dans la capitale économique, Port-Gentil, afin de sécuriser « l’exploitation » de « leurs » richesses pétrolières, de protéger « leurs » intérêts économiques et leurs populations « immigrées » au Gabon. Sous couvert de garantir la sécurité des biens et des personnes français, les militaires envoyés en renfort pourraient bien renseigner leurs collèges gabonais et au besoin les aider nuitamment sans être vus. Le cas de la Côte d’Ivoire est illustratif de ce point de vue. (3) L’assassinat politique, quant à lui, reste fortement d’actualité surtout s’il apparaît comme l’unique et ultime recours pour préserver la domination française au Gabon. Jean Ping et les fortes personnalités de la CNR comme Jean Eyeghe Ndong devraient prendre toutes les dispositions nécessaires pour éviter d’être les prochaines victimes d’un combat où les enjeux tellement colossaux peuvent conduire la pieuvre hideuse « FrançAfrique » à aller jusqu’à cette extrémité.

La France peut-elle, comme jadis, recourir systématiquement à la violence dans ses anciennes colonies pour préserver ses intérêts en toute impunité et à la face du monde ? Répondre à cette question c’est déjà relever la restriction de sa marge de manœuvre dans l’emploi de la force militaire pour maintenir son influence politique dans l’espace francophone africain.

  • Une nouvelle génération gabonaise décomplexée et consciente. La génération « androïd », « Sankara » ou « Kémi Seba » n’est en rien semblable à celles nées pendant la colonisation et juste après l’indépendance, et qui sont encore aux affaires aujourd’hui en Afrique. Au Gabon, malgré le rajeunissement forcé que l’imposteur Ali Bongo Ondimba a essayé d’imposer dans l’administration centrale et les autres instances républicaines de décision, les générations administrativement et politiquement actives, dans leur grande part, ont été nourries au biberon français. Pour ces générations, élevées et instruites dans les valeurs françaises, l’empire colonial demeure le maître vers lequel on doit systématiquement se tourner pour attendre la validation ou l’approbation d’une action à mener. Consciemment ou inconsciemment, ces générations acceptent et reconnaissent la tutelle morale, intellectuelle et politique de la France. Tout esprit de contestation à l’endroit de cette dernière leur est rétif, préférant toujours faire plaisir au maître. Et lorsqu’il y a une revendication légitime que l’on ne peut objectivement refréner, ces générations optent toujours pour la négociation avec la France et transige de ce fait avec la souveraineté nationale. Ces générations récusent l’idée même d’établir un rapport de force politique avec l’Hexagone, persuadés qu’ils sont qu’à ce jeu, le maître est de première force. Mais les nouvelles générations sont d’un tout autre tonneau, car instruites dans les universités du monde entier et évoluant dans un multivers multiparadigmatique, elles entendent prendre la place qui est la leur dans le concert des nations et assumer pleinement leur destin. Pour ces nouvelles générations qui entrent en politique, et deviennent de plus en plus nombreuses sur la scène nationale, la France malgré les liens historiques et séculaires tissés avec le Gabon, reste un simple partenaire au même titre que la Chine, le Brésil ou la Russie. L’esprit de subordination chronique au maître, qui caractérisait tant l’ancienne génération, a été banni de la mentalité de ces nouvelles générations qui conçoivent que le partenariat avec la France doit changer ou cesser si les intérêts supérieurs de leur pays ne sont pas pris en compte. La diaspora gabonaise en France et aux Etats-Unis atteste parfaitement de cela. Elle qui n’hésite pas à mettre publiquement la France officielle et des réseaux face à ses contradictions. Cette diaspora, nous en sommes convaincus, est représentative du peuple gabonais du IIIème millénaire, peuple mature, conscient de sa souveraineté et entendant l’exercer en s’opposant sans peur à ses oppresseurs.

La France peut-elle reconquérir et endoctriner ces nouvelles générations gabonaises qui ont mis à nu son ambivalence, sa duplicité et son désir souverain de les maintenir dans la précarité afin de mieux les contrôler? Répondre à cette question c’est déjà relever la restriction de sa marge de manœuvre dans l’assujettissement des masses gabonaises.

  • Contexte effervescent et délétère de l’Afrique centrale. Si dans son aveuglement à ne pas voir le triomphe du scrutin du 27 août 2016 se traduire par l’investiture officielle de Jean Ping comme président de la République gabonaise, la France officielle et des réseaux ouvre la porte à une déstabilisation du Gabon en soutenant l’élection d’un candidat du système Bongo-PDG ou en aidant de nuit les militaires gabonais à « résoudre » des émeutes sociales nées d’une énième contestation post-électorale, pourra-t-elle ensuite contenir longtemps cette ferveur populaire de revendication démocratique légitime qui s’est emparée simultanément de toute l’Afrique centrale ? Cette région d’Afrique qui n’a connu aucune réelle alternance depuis les années 1960 d’indépendance, en comparaison à celle d’Afrique de l’Ouest, ne supporte plus la chape de plomb dictatoriale maintenue par la France officielle et des réseaux. Les incendies du Cameroun en proie à la sécession anglophone et à la contestation post-électorale, ceux du Centrafrique déstabilisé par des soubresauts terroristes aux relents de guerre civile, ceux du Tchad à nouveau face à une rébellion armée, Ceux du Congo-Brazzaville qui peut très vite renouer avec les guerres civiles dont il est coutumier du fait depuis la fin des années 1950 et même ceux de la Guinée-Equatoriale traumatisée par une tentative de coup d’Etat  où la France est mise à l’index, pourront-ils tous être éteints sans que la France officielle et des réseaux ne se brûle quelques plumes ? Nous en doutons !

La France va-t-elle prendre le risque d’embraser davantage le foyer de tension au Gabon et de porter à incandescence toute l’Afrique centrale sans en payer le prix fort quand le calme finira par revenir dans cette région? Répondre à cette question c’est déjà relever la restriction de sa marge de manœuvre dans son rôle séculier de gendarme d’Afrique centrale.

  • Immigration et montée des extrêmes politiques en Europe. La construction européenne, notamment l’espace Schengen, est actuellement mise à mal avec le Brexit, la montée des populismes nationalistes portés par les extrêmes politiques de gauche ou de droite. Pour beaucoup d’analystes et éditorialistes de la presse européenne, l’immigration clandestine est à comptabiliser au nombre des nombreuses causes comme le chômage, les politiques européennes de rigueur budgétaire et le cynisme du capitalisme triomphant qui sont à l’origine de la précarité, voire de la pauvreté d’une masse grandissante des populations d’Europe. Les partis d’extrême droite ou gauche, qui ne peuvent pour l’heure s’attaquer à l’Europe et au grand capital, pourfendent allègrement l’immigration clandestine avec les bons résultats électoraux qu’ils enregistrent. En Hongrie, l’ultra-nationaliste Viktor Orbán, actuel premier ministre, mène une politique ouvertement anti-immigrationniste pour le plus grand bonheur de la majorité de ses concitoyens. En Autriche, le très jeune Chancelier Fédéral de 31 ans, Sebastien Kurz arrive au pouvoir grâce à une  campagne menée sur les thèmes de l'immigration, l'islam et la sécurité et à la clé, une alliance avec le Parti de la Liberté d’Autriche (FPÖ), parti nationaliste, voire xénophobe. L’Alternative für Deutschland (AFD) ou l’Alternative pour l’Allemagne, est le premier parti néo-nazi à faire son entrée au parlement allemand depuis la défaite cinglante de l’Allemagne nazie lors de la deuxième guerre mondiale achevée en avril-mai 1945. Situation politique exceptionnelle et inédite en Allemagne qui, tout en fragilisant la coalition CDU/CSU/SPD conduite par la chancelière Angela Merkel au point de la pousser à se retirer bientôt de la politique, témoigne clairement du rejet grandissant d’une frange de la population allemande à l’endroit des immigrés. L’Italien Matteo Salvini, actuel président du Conseil, issu d’une coalition des extrêmes à la fois de gauche et de droite italiennes entend mener une politique résolument anti-immigrationniste comme le souhaitent les électeurs qui l’ont porté au pouvoir. En France, la présence pour la seconde fois d’un candidat du Front national au deuxième tour des élections présidentielles, traduit clairement la cristallisation croissante d’un sentiment nationaliste prônant que les malheurs de la France ont pour cause l’immigration.  Ce panorama européen montre à suffisance qu’il faut établir un lien étroit entre le rejet populiste de l’immigration et la montée des partis extrémistes en Europe. L’intervention militaire de l’OTAN, conduite par la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, en Lybie a libéré une puissante vague d’immigration en direction de l’Europe. Pour nombre d’analystes politiques européens, la politique africaine de la France est co-responsable de cette poussée immigrante en Europe. Outre les guerres qu’elle occasionne en Afrique, la France, par les soutiens indéfectibles de tous ses gouvernements aux dictateurs d’Afrique subsaharienne qui asservissent et appauvrissent leurs peuples, est de plus en plus montrée du doigt et tenue responsable de cette immigration de réfugiés économiques et de guerre.

Si la montée des partis politiques d’extrême droite ou gauche devient une menace pour la démocratie en Europe comme dans les années 1930, comment la France peut-elle continuer à juguler l’immigration clandestine qui est le terreau des partis nationalistes en soutenant les dictatures africaines francophones? Répondre à cette question c’est déjà relever la restriction de sa marge de manœuvre dans son soutien aux régimes dictatoriaux pourvoyeurs d’immigration économique.

Il apparaît, à la lecture de cet exposé factuel, que la France, malgré sa force « historique », ne dispose plus de tous les leviers nécessaires pour imposer intégralement comme avant sa vision politique dans l’espace francophone africain toujours accroché à ses basques. Si la France s’est indubitablement affaiblie, qu’en est-il de son allié et complice gabonais, le système Bongo-PDG ?

FORCES ET FAIBLESSES DU SYSTEME DECLINANT BONGO-PDG. Il n’échappe plus à personne que la bonne et grande période de gloire « kounabéliste » du PDG est révolue. Dès le début des années 1980, les premiers coups de butoir du MORENA, alors parti politique clandestin de l’ère monopartite, avaient commencé à entamer sérieusement le grand et « bel » édifice qu’était le PDG, créé en 1968 à Koulamoutou par Albert-Bernard Bongo, Zacharie Myboto et Léon Augé. Aujourd’hui, le PDG, toujours au pouvoir, a réellement perdu de sa superbe et est devenu l’ombre de lui-même. La conférence nationale et la restauration du multipartisme survenues au début de la décade 1990 et prônées par feu Simon Oyono Aba’a l’ont littéralement mis à genoux. Mais il faut attendre la mort du président-fondateur, Omar Bongo Ondimba, à Barcelone en juin 2009, pour que le « grand parti des masses » se ramasse à « plat ventre sur le dos », comme l’aurait chanté Pierre-Claver Akendengue. L’arrogance et l’amateurisme d’Ali Bongo Ondimba, devenu par effraction « Distingué Camarade » et président de la République, n’y ont rien changé à l’affaire : le PDG a implosé en multiples factions dont certaines sont rentrées résolument dans l’opposition au système Bongo (Union Nationale [UN], Rassemblement Héritage et Modernité [RHM], les Démocrates, Démocratie Nouvelle [DN], etc.) et d’autres sont restées fidèle au Raïs tout en se divisant violemment (MOGABO, AJEV, etc.). Ce qui reste du système Bongo-PDG se résume aux (1) Bongomariens-caciques mis sur la touche dès 2009, (2) aux Emergents alistes scindés en (2a) Légion étrangère, (2b) MOGABO et (2c) AJEV.

  • Forces du système Bongo-PDG. L’armée ou la force militaire est dorénavant le seul rempart, la seule force dont dispose encore le système laissé en héritage par Omar Bongo Ondimba. Et s’il nous est permis d’être plus précis, disons-le clairement, en lieu et place de l’armée nationale, il y a la garde républicaine et les milices composées principalement de mercenaires rwandais. Si comme au Burkina-Faso, en septembre 2015, lors du coup d’Etat mené par le général Gilbert Diendéré pour mettre fin à la transition démocratique conduite par le président Michel Kafando, une frange de l’armée nationale gabonaise se ligue contre quelques agents survoltés de la garde républicaine et les milices aux ordres pour perpétuer un système moribond, cette « prétendue » force sera totalement réduite à néant. On le voit, la force « sécuritaire » du système Bongo-PDG tient à peu de choses, sauf si elle est appuyée par le complice français, plus performant dans ce domaine.
  • Faiblesses du système Bongo-PDG. 51 ans d’existence, cela est suffisamment long pour un régime dans la vie d’un pays. La vigueur du jeune parti soixante-huitard s’en est allé à force d’incompétence, de corruption, de luxure et d’absence de réelle volonté de développer un pays si faiblement peuplé et si immensément riche. La première faiblesse du système Bongo-PDG relève de la psychologie des Gabonais : le régime incriminé s’est totalement et absolument discrédité. L’image actuelle que renvoie le Gabon n’est pas celle que les citoyens, conscients des incommensurables richesses nationales, étaient en droit d’attendre. Cette perte de confiance s’est installée progressivement depuis les premières critiques formulées par le MORENA en 1981. La deuxième faiblesse, liée à la première, est le piteux et pitoyable bilan de près d’un demi-siècle de gestion de l’Etat gabonais par le système Bongo-PDG. La comparaison (honteuse) avec un pays pauvre et enclavé comme le Rwanda de Paul Kagamé est par trop humiliante et montre le niveau extraordinaire d’incurie de la classe politique dirigeante gabonaise. Et que dire du petit Etat voisin de Guinée Equatoriale qui a rabattu le caquet au grand-frère Gabon qui le méprisait encore il y’a à peine 20 ans ! Si l’on accordait même encore au PDG un demi-siècle de gouvernance, il serait dans l’incapacité, à cause de sa culture de jouissance, de redresser la barre et de construire le Gabon. La troisième faiblesse tient de l’extrême division qui traverse la famille Bongo-PDG. Comment, en effet, en situation de crise politique aigüe et inattendue, mettre ensemble des franges antagonistes du système qui se battaient encore âprement avant la sortie de piste définitive de leur gourou à Riyad en Arabie Saoudite ? La quatrième faiblesse, subséquente à la troisième, est l’impossibilité de trouver et de s’accorder sur un candidat consensuel du système Bongo-PDG en lambeaux qui serait en mesure de remplacer au pied levé l’illustre disparu. L’accumulation de toutes les faiblesses précitées fragilise énormément le système Bongo-PDG et en fait un adversaire très vulnérable que la CNR de Jean Ping pourrait écarter du pouvoir.

Mais comment y arriver ?

Après une analyse stratégique du terrain, du contexte, de l’adversaire et ses stratégies, le temps de suggérer un plan d’attaque pour vaincre la partie adverse est arrivé. Nous soumettons, à l’attention de Jean Ping et de l’état-major de la CNR, les propositions suivantes qui, si elles inspirent la stratégie de « la résistance », peuvent conduire, pour la première fois, à l’avènement de l’alternance et du changement dans notre pays.

LE SCENARIO DE PRISE DE POUVOIR PAR UN ACCORD POLITIQUE. Dans cette hypothèse, Jean Ping a l’extrême obligation de re-fédérer autour de lui et sa légitimité populaire toute la classe politique qui l’a soutenu pendant la campagne présidentielle. Nonobstant les incompréhensions, les trahisons, les séparations et les divergences d’actions qui ont émaillé le turbulent fleuve de la résistance, l’heure est à la réconciliation nationale pour réfléchir ensemble sur les moyens idoines de faire triompher le verdict des urnes exprimé le 27 août 2016. Mais outre ses alliés épars, Jean Ping doit aussi tendre la main aux PDGistes de bonne foi qui ne sont pas intérieurement mécontents de voir leur pays sortir d’un joug monarchique et dynastique absolument improductif. Le discours rassembleur du 03 novembre 2018 allait effectivement dans ce sens. Les tractations politiques qui ont lieu actuellement à la « piscine » de la résidence du Charbonnages doivent (1) rassembler la CNR-recomposée, (2) rassurer le camp d’en face et celui de la France officielle et des réseaux quant à leurs énormes intérêts. Très simplement, il s’agit de mettre un terme définitif à la « dynastie présidentielle » des Bongo Ondimba en empêchant qu’un membre de cette famille s’empare à nouveau du pouvoir. Dans cette vue, toutes les aides, surtout celles venant du PDG sont les bienvenues. Ensuite il faut s’accorder sur le scénario politique de prise effective du pouvoir pour l’érection de la Nouvelle République. Le scénario d’une transition constitutionnelle devant conduire à de nouvelles élections présidentielles dans les 60 jours consécutives à la constatation de la vacance du pouvoir doit être catégoriquement récusé. Ceci pour plusieurs raisons :

  • la première, qu’il ne convient pas de solliciter à nouveau le suffrage populaire alors que le peuple s’est déjà exprimé il y a deux ans et qu’il s’est fortement abstenu de prendre part aux dernières élections générales. Qu’un homme, Jean Ping, a eu la légitimité à plus de 68% des voix exprimées, que sa victoire a été volée mais qu’il a continué à la revendiquer inlassablement en rejetant tout compromis ou arrangement avec le pouvoir usurpateur.
  • La deuxième raison de refuser une nouvelle élection présidentielle tient dans le fait d’empêcher la démolition de la précaire unité nationale consacrée dans la candidature consensuelle de Jean Ping et qui a permis qu’un Nkomi de l’Ogooué-Maritime se trouve plébiscité dans une province, réputée identitaire, comme celle du Woleu-Ntem des Ekang. Nous sommes bien loin du « repli identitaire » qui aurait, selon certains observateurs, caractérisé le scrutin de l’élection présidentielle anticipée d’août 2009.
  • La troisième et dernière raison, la plus importante à notre humble sens, est qu’il faut épuiser et vider totalement le contentieux post-électoral soumis par le candidat Jean Ping à la Cour constitutionnelle. Ce contentieux n’a jamais été traité conformément à la loi électorale et aux procédures administratives en vigueur. Il a été interrompu et n’est jamais allé jusqu’à son terme par la volonté d’un seul homme qui a souhaité pour la seconde fois s’emparer brutalement du pouvoir. La confrontation régulière, par les parties en conflit, des procès-verbaux de la seule province litigieuse du Haut-Ogooué n’a jamais eu lieu. De même, la reprise de l’élection présidentielle, annulée dans les 21 bureaux de vote du 2ème arrondissement de la province de l’Estuaire, n’a point été opérée. Maintenant que « l’empêcheur » de vider le contentieux est inoffensif à jamais, il conviendrait de reprendre la procédure de recours là où elle s’était arrêtée pour déterminer les véritables scores dans la province du Haut-Ogooué, et partant le réel vainqueur de la dernière élection présidentielle. Cette démarche sage qui respecte le droit et la justice nous permettrait véritablement d’asseoir notre démocratie sur les bases saines (un homme, une voix) et nous éviterait une dépense colossale conséquente à la tenue d’une nouvelle élection présidentielle.

Le protocole de ce scénario de prise effective du pouvoir serait le suivant : Jean Ping, la CNR-recomposée, les PDGistes de bonne foi et les partis alliés arrêtent un accord politique dont les axes importants porteraient sur (1) la suspension de l’actuelle constitution, (2) l’exigence de l’épuisement du contentieux post-électoral et pour ce faire, l’Union Européenne (UE), l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) et l’Union Africaine (UA) doivent être mises à contribution pour exercer une pression internationale sur la Cour constitutionnelle et (3) la proclamation des vrais résultats du Haut-Ogooué devant conduire à l’investiture officielle de Jean Ping, comme président de la République gabonaise. Naturellement, les élections générales, récemment passées, devront être reprises après un redécoupage administratif et électoral plus en phase avec la réalité économique et socio-géographique du Gabon.

Si d’aventure la vacance de pouvoir venait à être constatée dans les prochains jours, le nouveau président de la République par intérim devra ordonner à la Cour constitutionnelle l’épuisement du contentieux post-électoral afin d’éviter une énième élection dont la majorité des Gabonais n’en veut guère. Les moyens de pression à exercer sur ce président par intérim seraient de deux ordres : l’action diplomatique des institutions susmentionnées et le bouillonnement de la rue.

LE SCENARIO DE PRISE DE POUVOIR PAR LA RUE. Si l’accord politique ne peut être conclu parce que la classe politique de l’opposition, de la résistance, des PDGistes de bonne foi et leurs partis alliés n’arrivent pas à transcender leurs habituels clivages égotiques et à s’élever au niveau qu’exigent les enjeux républicains de l’heure, alors le peuple dans la rue devra prendre son destin en main en portant Jean Ping à la tête du pays. Cette solution de rechange suppose que Jean Ping et la CNR ont recommencé à prendre langue avec le peuple de l’alternance et du changement et que cette préparation populaire se fait en parallèle avec les discussions portant sur l’accord politique.

Les deux scénarios, ici énoncés, peuvent matériellement se réaliser grâce à (1) un sursaut du sentiment patriotique de la classe politique, (2) une mobilisation forte des populations et (3) un leadership volontariste de Jean Ping. Cependant, pour s’assurer de l’efficacité des scénarios présentés, deux personnalités doivent être rendues inoffensives : Jean-Yves Le Drian, actuel ministre français de l’Europe et des Affaires Etrangères et Marie-Madeleine Mborantsuo, inamovible présidente de la Cour constitutionnelle au Gabon. La diaspora de France soutenue par Jean Ping et la CNR doit montrer à toute la France, le visage hideux et françafricain de Jean-Yves Le Drian pour qu’il n’ait pas les coudées franches dans son projet de ne pas respecter la légitimité populaire exprimée le 27 août 2016. Et au Gabon, des actions populaires de toute nature contestant l’imposture de la présidente de la Cour constitutionnelle qui apparaît désormais à l’évidence comme la vraie maîtresse de Libreville, doivent être menées pour mettre en échec sa prétention de perpétuer le système Bongo-PDG.

 

Fait à Libreville, le 23 novembre 2018.

 

Par Ngomo Privat./

 

 

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